MELODIE DER WELT




Fiche technique

  • Réalisateur : Walter Ruttmann
  • Scénariste : Walter Ruttmann
  • Musique : Wolfgang Zeller

Walter Ruttmann, est un cinéaste allemand pionner du « cinéma absolu », né le 28 décembre 1887 à Francfort et mort le 15 juillet 1941 à Berlin.
Après des débuts au cinéma avec des films abstraits (Opus I, II, III, IV) et avec des films expérimentaux fondés sur des essais visuels : Berlin, symphonie d'une grande ville (1927), Mélodie du monde (1929), Ruttmann pousse les limites de l'expérimentation dans Week-end (1930), qui ne comporte qu'une bande-son sans image.
  
Week-end fut montré au deuxième congrès du cinéma indépendant de Bruxelles, en 1930. Jean Lenauer décrit le film avec pertinence dans le journal Pour vous du 24 juillet 1930 : « C’est un film parlant sans images. Oui sans images, pas un disque de phonographe mais un enregistrement sur film monté selon l’esprit du cinéma et auquel il ne manque que les images purement visuelles ; de même qu’on a fait du film muet on peut aujourd’hui, pour ainsi dire, faire du film « aveugle » ». Dans ce même article, Ruttmann explique très clairement sa conception du son cinématographique. Au lieu de l’utiliser comme un élément « décoratif destiné à souligner l’image », il souhaite produire « des choses différentes de l’image ». Le cinéaste précise : « il y a une perspective des sons comme il existe une perspective des lignes et l’on obtient, suivant que l’objet s’approche ou s’éloigne du microphone, une gamme infiniment variée de valeurs sonores ». C’est à cette recherche somme toute assez naïve de nuances sonores cueillies sur le vif avec des moyens techniques rudimentaires mais étonnamment précis et à leur juxtaposition à l’état de bribes (de signes d’une époque) suivant une trame narrative assez cocasse - surréaliste - que nous assistons à chaque fois que nous écoutons (ou regardons) ce film.

Il collabore, à l'orée de la Seconde Guerre mondiale, à des œuvres national-socialistes, comme Les Dieux du stade de Leni Riefenstahl. Il est mort le 15 juillet 1941 à Berlin des suites d'une blessure, alors qu'il tournait un film de propagande sur le front russe.

 
Le film se structure comme une symphonie visuelle, dans laquelle les Berlinois de 1927 jouent leur partition.
Contrairement à L'homme à la caméra de Vertov, les prises de vues sont classiques, presque esthétisantes et rythmées par les seuls mouvements des passants alternativement rapides ou lents avec des changements d'axes qui évoquent le flux de l'activité d'une grande ville.


Dans les épisodes 1, 2 et 4, une horloge indique l'heure comme si le film se déroulait sur une seule journée. Une partie de l'épisode 4 évoque pourtant la journée du dimanche avec ses activités de détente.
Une version de 1 446 mètres a été restaurée par la cinémathèque allemande en 2007.
Le film de Ruttmann, sur une idée de Carl Mayer, lance la formule du film symphonique dont Ménilmontant (1925) et Brumes d'automne (1927) de Kirsanoff étaient les précurseurs et qui donnera un autre chef-d'oeuvre : L'homme à la caméra (Vertov 1929). La formule du film symphonique se retrouve dans Paris Londres (Jean Arroy, 1927), A propos de Nice (Jean Vigo), Saô Paulo, symphonie d'une métropole (Alberto Kermany, 1929) ou même Pluie (1929) de Joris Ivens qui entreprend de restituer comme observée à la loupe l'aventure globale d'une ville sous une averse.
Georges Sadoul qui voit là s'amorcer un puissant retour au monde concret proposera d'appeler "troisième avant-garde" les cinéastes attentifs à la fois vérité des lieux, aux décors réels traités avec un soin ethnographique, aux rues démultipliées et aux surimpressions.