Affichage des articles dont le libellé est cinéma expérimental. Afficher tous les articles
Affichage des articles dont le libellé est cinéma expérimental. Afficher tous les articles

Traité de bave et d'éternité


Pays : France
Année : 1951
Réalisation : Isidore Isou
Avec : Marcel Achard, Isidore Isou, Jean-Louis Barrault, Jean Cocteau, Daniel Gélin
Durée : 123 mn


Traité de bave et d'éternité est un film expérimental français écrit et réalisé par Isidore Isou en 1951, produit par Marc'O, et monté avec l'aide de Maurice Lemaître. Il s'agit de la première œuvre du cinéma lettriste.


Isidore Isou est le fondateur en 1945 du mouvement lettriste, prenant la suite des mouvements Dada et Surréaliste et ouvrant la voie au Situationnisme, à Fluxus et l'art conceptuel. Isou introduit dans les années 50 les concepts d'hypergraphie puis l'art infinitésémal. Son premier film, Traité de bave et d'éternité fait scandale au festival de Cannes, où Isou et d'autres lettristes débarquent en 1951 et où Guy Debord, alors lycéen, le rencontre. Jean Cocteau décernera au film le Prix de l'Avant-garde et en dessinera l'affiche


 
Isou définit la période amplique comme la phase d'expansion des techniques et des thématiques du cinéma depuis son origine jusqu'aux réalisations surréalistes. Sur le plan technique on invente la caméra puis on perfectionne son optique. Au niveau du thème, les cinéastes abordent tous les sujets de manière quasi encyclopédique (historique, burlesque, western, épouvante).
Isou rend hommage à tous ces auteurs qui ont innovés dans le cinéma : les frères Lumière, Méliès, Griffith, Chaplin, Clair, Eisenstein, Von Stroheim, Flaherty, Bunuel et Cocteau. Cependant, Isou veut rompre définitivement avec cette phase amplique. Selon lui, pour permettre au cinéma de se renouveler, il faut que celui-ci se replie sur ses propres apports passés.
Ce nouveau cinéma appelé ciselant détruit ses bases référentielles pour révéler des beautés destructrices et d'anéantissement. Pour cela, Isou démantèle le synchronisme du son et de l'image et intervient directement sur la pellicule pour la nier, la détruire puis l'oublier. Après des réalisations sur pellicule, les lettristes poseront donc la question suivante : peut-on faire des films sans pellicule ?

 

Avec le Traité de bave et d'éternité, Isou invente le montage discrépant qui a pour principe la disjonction du son et de l'image. Il les traite de manière autonome comme deux colonnes indépendantes et pures sans aucune relation signifiante.La colonne sonore s'ouvre avec des improvisations de chœurs lettristes « en boucles » sur lesquels se mêlent une histoire d'amour enchâssée dans un manifeste pour un nouveau cinéma.La colonne visuelle possède également sa propre structure narrative en présentant une succession d'images banales : Isou errant sur le boulevard Saint Germain, des fragments de films militaires récupérés dans les poubelles de l'armée française, des exercices de gymnastiques, Isou en compagnie de personnalités (Cocteau, Cendrars…).L'autre travail sur l'image porte sur la ciselure des photogrammes. Isou intervient, gratte, peint directement sur la pellicule. Le montage discrépant et la ciselure annoncent la mort d'une certaine idée du cinéma. Le Traité sera suivi du très célèbre Le film est déjà commencé ? (1951) de Maurice Lemaître et de son principe de Syncinéma. Pour la première fois au cinéma, des acteurs in vivo se mêlent à la séance, de la salle de projection à la file d'attente sur le trottoir, élargissant ainsi le film au-delà de l'écran. 

 

 

 

 Site: www.lelettrisme.com



Les Aventures d'Eddie Turley de Gérard Courant

Gérard Courant

 

Passionné de cinéma, Gérard Courant est l'animateur du ciné-club de l'université où il fait ses études de droit. Arrivé à Paris en 1976, il crée la revue Cinéma différent, participe au Collectif Jeune Cinéma et fonde (avec, entre autres, Chantal Akerman) la Coopérative des Cinéastes vouée à la diffusion de films indépendants. Cinéaste indépendant et expérimental, Gérard Courant entame à partir de 1978 son oeuvre majeure, Le cinématon, après avoir réalisé plusieurs courts-métrages en 16 mm, dont Marilyn, Guy Lux et les nonnes (1976) ou MMMMM. (1977). Avec Rasage (1978), le réalisateur tourne son premier film en super-huit : il utilise une double vue, celle de gauche où une barbe est en train d'être rasée et celle de droite où elle se reconstitue. Gérard Courant entame cette même année, toujours en super-huit et en plans fixes de 3,25 mn, une série de portraits muets d'amis et de personnalités du cinéma, les Cinématon. Qualifiée de "plus long film de l'histoire", cette galerie atteint dix ans plus tard le millier de portraits, prolongée par de nouvelles mises en scène (Les couples, Les groupes et Lire). Toujours très proche de la photographie dans ses réalisations, le cinéaste pousse l'exercice jusqu'à tourner un film uniquement à partir de clichés (Un sanglant symbole, 1979, réalisé à partir de cent soixante photographies) ou encore jusqu'à jouer image par image (La neige tremblait sur les arbres, 1981). Critique et théoricien du cinéma, Gérard Courant participe aux revues Art Press et Cinéma 77-81. Cofondateur en 1978 de l'Association des cinéastes indépendants, différents et expérimentaux (Acide), il crée Kock Diffusion en 1980, un organe de diffusion de films indépendants. Se prêtant au jeu de l'acteur, il interprète plusieurs rôles dans Omelette (1998) ou encore dans Les aventures de Reinette et Mirabelle (1987).




ENTRETIEN AVEC GÉRARD COURANT (SUR LES AVENTURES D'EDDIE TURLEY)

Au festival des Films chiants, qui s'est déroulé à la Picolthèque du 25 mars au 3 avril 1997, vous avez pu voir le 3 avril, à 20 heures 30, Les Aventures d’Eddie Turley de Gérard Courant. Entièrement réalisée en images fixes, cette « science-fiction poétique » fut tournée en décors naturels. L’auteur du « film le plus long du monde », le Cinématon (120 heures de portraits de 3 minutes en plans fixes), recompose le mouvement à partir de photographies : il crée un univers fantomatique en noir et blanc, Moderncity, la totalitaire, où évoluent des silhouettes échappées du roman noir américain. Quand Les Aventures d’Eddie Turley furent présentées au festival de Cannes, dans la section Perspectives du cinéma français (ancêtre de Cinéma en France), le cinéma indépendant était au sommet de la vague.

« Ce film n’avait pas eu l’avance sur recettes, ni sur scénario, ni sur film terminé. Il a été présenté au festival de Cannes en 1987 et c’est seulement deux ans après qu’il a pu sortir en salle. D’ailleurs, Michel Poirier, le distributeur du film, m’avait dit, peu après, que si j’avais réalisé ce film quelques années plus tard, il aurait été plus difficile de le sortir, tant la situation du cinéma s’était dégradée ».

« J’ai eu la chance d’arriver à Paris au milieu des années 1970, à un moment où le cinéma indépendant était en pleine renaissance. Mais depuis la fin des années 1980, c’est la lente dégringolade, qui touche aussi les arts plastiques, la musique et le théâtre. L’heure est à la rentabilité à court terme. Tout le monde est touché ».

« Pour en revenir aux Aventures d’Eddie Turley, il faut savoir que j’ai mis quatre ans à le réaliser. Bien sûr, je n’ai pas seulement fait ce film durant tout ce temps-là : j’ai continué à filmer mes Cinématons, à créer des nouvelles séries cinématographiques (Portrait de groupe, Couple, Lire, Avec Mariola) et j’ai réalisé un long métrage en Grèce (À propos de la Grèce).

Pour Eddie Turley, il y a donc eu un an de tournage, à Paris, Berlin, New York, la Suisse, etc., un an pour fabriquer les photographies – en fait, des photogrammes – à partir de la pellicule cinématographique, un an pour les refilmer en 35 mm sur un banc-titre et un an pour le montage. À partir de la pellicule cinématographique, j’ai tiré 7 000 photogrammes dont je n’en ai conservé que 2 400 dans le montage final. Tout le film est fait d’images fixes. Il n’y a jamais de mouvement à l’intérieur d’une image. Ce film était un pari : je voulais démontrer qu’on pouvait faire naître le mouvement qu’à partir d’images fixes. Pardonnez-moi d’enfoncer des portes ouvertes, mais il n’est pas inutile de le redire : le cinéma n’est pas mouvement, il est l’illusion du mouvement ; le cinéma, ne l’oublions pas, ce sont 24 images fixes par secondes ».

« Le pari ne se limitait pas seulement à ces questions techniques : il était également esthétique. Tout le film a été tourné en décors naturels. Je désirais créer un film de science-fiction, qu’à partir d’éléments de la réalité qui existaient au moment du tournage. Tous les décors du film existent réellement : la Défense, Montparnasse, les quais de Bercy à Paris, Manhattan à New York, le mur de Berlin, etc. »

« Bien que je ne sois pas photographe, j’ai toujours eu un rapport privilégié avec la photographie qui est souvent présente dans mes films, sous les formes les plus diverses. Je pense évidemment aux Cinématons qui sont un peu la transposition de la photo d’identité en cinéma ou de la série Portrait de groupe qui en est la transposition de la photo de famille. Mais je pense aussi à des films de long métrage avec un seul personnage féminin, comme Aditya ou Cœur bleu qui, d’une certaine manière, sont proches de la séance photo qui réunit le photographe avec son modèle. Aux quelques rouleaux de pellicules qui donneront une ou deux centaines de photos, ces films proposent un film entier avec un personnage, filmé sous toutes les coutures. Je pense encore à ces films que j’ai tourné image par image (comme À propos de la Grèce, Cocktail Morlock, Baignoire), puis retravaillés à la truca, où le mouvement est complètement recomposé. Enfin, je n’oublie pas que mon premier film, Marilyn, Guy Lux et les nonnes et un de mes suivants, Un sanglant symbole, ont été réalisés qu’à partir de photographies ».

« Avec les Cinématons, assez vite, j’ai voulu faire un film de 24 heures. Mais j’ai rapidement dépassé mes prévisions. Au départ, le projet était simple : je voulais créer une mémoire cinématographique des personnes que je connaissais dans le milieu du cinéma indépendant. Je voulais garder une trace d’eux. Souvent, ils étaient inconnus, mais j’avais toujours, quelque part dans le fond de ma pensée, cette idée que, un jour – peut-être même après leur mort ! – on découvrirait leur œuvre. Et pour ceux qui s’intéresseraient à leur travail artistique, j’étais persuadé que les images de ces Cinématons leur seraient très utiles pour mieux comprendre la démarche de ces artistes ».

« Et puis, rapidement, mon champ de filmage s’est étendu à tous les milieux artistiques. J’aurais peut-être pu me lasser de ne filmer que des gens de cinéma. Rencontrer des peintres, des écrivains, des philosophes, des musiciens, des danseurs fut, à un moment donné, comme une bouffée d’oxygène qui m’a évité de me scléroser et m’a permis de continuer plus aisément les Cinématons. Certaines personnes ne se rendent pas compte combien c’est enrichissant de rencontrer des personnalités aussi diverses. Elles s’imaginent que je fais un travail mécanique, robotique et que je m’intéresse que de façon lointaine aux personnes que je filme. Comment pourrait-il en être ainsi ? Si c’était le cas, j’aurais filmé seulement quelques personnes et le film se serait arrêté de lui-même ».

« Depuis cinq ans, je me suis lancé dans un immense chantier : le travail de montage de ce que j’appelle mes Carnets filmés, qui sont à la fois un journal filmé, des notes de tournages et de voyages, des repérages, des essais de caméra, des rushes, ou encore des films inachevés ou des films ratés, etc. Parallèlement à tous mes autres films, j’ai toujours tourné ces Carnets filmés que j’ai commencé dans les années 1970 et que je n’avais jamais monté ».

« Le cinéma indépendant est actuellement dans le creux de la vague, mais je ne suis pas pessimiste. Il faut se battre pour continuer à faire des films. Il faut maintenir le cap et ne jamais lâcher le morceau. C’est dans les périodes les plus difficiles, que l’on se forge un moral de battant et que l’on fait, parfois, ses meilleurs films. En aucun cas, un artiste ne doit baisser les bras à cause des contingences économiques, politiques ou de quelque sorte que ce soit qui sont défavorables. Il est toujours possible de dégringoler d’un format à un autre : passer du 35 mm au 16 mm, du 16 mm au Super 8 mm ou du Super 8 mm à la vidéo. J’ai tourné sur tous les supports et j’en ai une certaine fierté : 35 mm, 16 mm, Super 8 mm, Vidéo 1/4 de pouce, S VHS, HI 8, Beta, etc. On n’a pas le droit de ne pas filmer pour l’unique raison économique. On trouvera toujours de la pellicule ou de la bande vidéo et un projecteur ou un écran de télévision pour offrir à des spectateurs ses images et ses sons. Ça serait trop facile de dire : c’est plus dur qu’avant, alors je ne fais plus rien. Il faut soutenir Pierre Merejkowsky et son festival car il est la preuve concrète de ce qu’il faut faire. Il faut que Pierre donne des idées à d’autres, que se créent des îlots de résistance un peu partout en France et à l’étranger ».

Propos recueillis par Michèle Rollin, Le Monde Libertaire, 27 mars 1997


 


Les Aventures d’Eddie Turley II
La principale originalité de ce deuxième opus des Aventures d’Eddie Turley, c’est que la bande son est strictement identique au premier, filmé vingt-cinq ans auparavant.

Les Aventures d’Eddie Turley, c’était deux films en un : le film de l’image et le film de la voix. Le film de la voix n’était pas un commentaire au sens habituel, ni une voix off du film de l’image. C’était la voix intérieure d’Eddie Turley qui racontait son épopée et ses états d’âme à Moderncity.

Avec Les Aventures d’Eddie Turley II, cette dichotomie entre le film de l’image et le film de la voix est encore plus évidente car le film de l’image a été totalement transformé. Les images fixes en noir et blanc positif ont été remplacées par des images en couleur négative, filmées à 15 images par seconde avec un téléphone portable (ce qui leur donne ce mouvement légèrement haché), les personnages ont totalement disparu du cadre, le décor est devenu vide, seulement habité par la voix d’Eddie Turley.

Le film est fait de longs travellings à travers Moderncity, cité triste, morne et déshumanisée. Cette composition rythmée de mouvements et cette absence de personnages rendent plus vraie et plus claire la voix d’Eddie Turley et plus fort et plus limpide le discours du film.

Le deuxième Eddie Turley est une sorte de chambre de résonance au premier. Avec la même histoire, les mêmes personnages (devenus off), l’accent change. Ce qui semblait nostalgie du polar et de la science-fiction devient mythe romantique, histoire d’amour, quête de liberté. (Gérard Courant)




 

Site: www.gerardcourant.com

 


 

MELODIE DER WELT




Fiche technique

  • Réalisateur : Walter Ruttmann
  • Scénariste : Walter Ruttmann
  • Musique : Wolfgang Zeller

Walter Ruttmann, est un cinéaste allemand pionner du « cinéma absolu », né le 28 décembre 1887 à Francfort et mort le 15 juillet 1941 à Berlin.
Après des débuts au cinéma avec des films abstraits (Opus I, II, III, IV) et avec des films expérimentaux fondés sur des essais visuels : Berlin, symphonie d'une grande ville (1927), Mélodie du monde (1929), Ruttmann pousse les limites de l'expérimentation dans Week-end (1930), qui ne comporte qu'une bande-son sans image.
  
Week-end fut montré au deuxième congrès du cinéma indépendant de Bruxelles, en 1930. Jean Lenauer décrit le film avec pertinence dans le journal Pour vous du 24 juillet 1930 : « C’est un film parlant sans images. Oui sans images, pas un disque de phonographe mais un enregistrement sur film monté selon l’esprit du cinéma et auquel il ne manque que les images purement visuelles ; de même qu’on a fait du film muet on peut aujourd’hui, pour ainsi dire, faire du film « aveugle » ». Dans ce même article, Ruttmann explique très clairement sa conception du son cinématographique. Au lieu de l’utiliser comme un élément « décoratif destiné à souligner l’image », il souhaite produire « des choses différentes de l’image ». Le cinéaste précise : « il y a une perspective des sons comme il existe une perspective des lignes et l’on obtient, suivant que l’objet s’approche ou s’éloigne du microphone, une gamme infiniment variée de valeurs sonores ». C’est à cette recherche somme toute assez naïve de nuances sonores cueillies sur le vif avec des moyens techniques rudimentaires mais étonnamment précis et à leur juxtaposition à l’état de bribes (de signes d’une époque) suivant une trame narrative assez cocasse - surréaliste - que nous assistons à chaque fois que nous écoutons (ou regardons) ce film.

Il collabore, à l'orée de la Seconde Guerre mondiale, à des œuvres national-socialistes, comme Les Dieux du stade de Leni Riefenstahl. Il est mort le 15 juillet 1941 à Berlin des suites d'une blessure, alors qu'il tournait un film de propagande sur le front russe.

 
Le film se structure comme une symphonie visuelle, dans laquelle les Berlinois de 1927 jouent leur partition.
Contrairement à L'homme à la caméra de Vertov, les prises de vues sont classiques, presque esthétisantes et rythmées par les seuls mouvements des passants alternativement rapides ou lents avec des changements d'axes qui évoquent le flux de l'activité d'une grande ville.


Dans les épisodes 1, 2 et 4, une horloge indique l'heure comme si le film se déroulait sur une seule journée. Une partie de l'épisode 4 évoque pourtant la journée du dimanche avec ses activités de détente.
Une version de 1 446 mètres a été restaurée par la cinémathèque allemande en 2007.
Le film de Ruttmann, sur une idée de Carl Mayer, lance la formule du film symphonique dont Ménilmontant (1925) et Brumes d'automne (1927) de Kirsanoff étaient les précurseurs et qui donnera un autre chef-d'oeuvre : L'homme à la caméra (Vertov 1929). La formule du film symphonique se retrouve dans Paris Londres (Jean Arroy, 1927), A propos de Nice (Jean Vigo), Saô Paulo, symphonie d'une métropole (Alberto Kermany, 1929) ou même Pluie (1929) de Joris Ivens qui entreprend de restituer comme observée à la loupe l'aventure globale d'une ville sous une averse.
Georges Sadoul qui voit là s'amorcer un puissant retour au monde concret proposera d'appeler "troisième avant-garde" les cinéastes attentifs à la fois vérité des lieux, aux décors réels traités avec un soin ethnographique, aux rues démultipliées et aux surimpressions. 




Le cinéma, c'est l'écriture moderne dont l'encre est la lumière.

Le cinéma, c'est l'écriture moderne dont l'encre est la lumière.

Le cinéma, c'est l'écriture moderne dont l'encre est la lumière.
Jean Cocteau



Mummy 1978


...


O le joli conte que voilà,
La biche, en femme, se changea,
La, la, la, la 

Marcel Hanoun




Né le 26 octobre 1929 à Tunis, décédé le 22 septembre 2012 à Créteil, Marcel Hanoun traverse une première fois, enfant, la Méditerranée. Il revient définitivement en France, à Paris, après la Libération. Passionné d’aviation il est auditeur libre en technique aéronautique et en mécanique générale au CNAM. Dans les années 50 il suit des cours d’art dramatique et l’enseignement d’André Vigneau au C.E.R.T. (Centre d’Etudes de Radio Télévision). Il fait mille métiers, il est photographe et journaliste tout en pratiquant le cinéma d’amateur. Il désapprend les règles de la technique et affirme son propre esthétisme du cinéma. Ses films – notamment UNE SIMPLE HISTOIRE (Grand Prix Eurovision à Cannes/1959) – ont depuis longtemps contourné l’exception culturelle, circulant dans les Universités américaines et les Cinémathèques. Cependant, ici, en France, il se heurte à l’exclusion culturelle, le refoulé, la face cachée, honteuse, inavouable, des faux tenants de l’exception culturelle.

En 1969 M.H. invente le titre et crée la revue Cinéthique dont il dirige les trois premiers numéros.  Parti tourner et monter L’HIVER en Belgique, en son absence, il n’est plus responsable de la déviance et de la tournure politique donnée à la revue.

Entre 1970 et 1980 il fait des tournées d’Universités aux Etats-Unis et au Canada (présentations de son travail, ateliers)

Marcel Hanoun a posé un principe de base : le cinéaste est un créateur d’écriture non un « auxiliaire de production ». Le 6 mars 1973, en riposte au 3ème refus de la commission d’avance sur recettes du C.N.C. d’examiner le scénario de LA VERITE SUR L’IMAGINAIRE PASSION D’UN INCONNU, il fait une grève de la faim. Son geste connaît un certain retentissement, la commission procède à la lecture du projet. M.H. accepte de surseoir à sa grève. Par 6 voix contre 6 la commission refuse l’avance...
…Il fera néanmoins son film…

Après 1976, il est, quelques années, chargé de cours à l’Université PARIS I

1994 Rétrospective au Musée du Jeu de Paume.

1997 M.H. anime une projection/débat à la Maison des Ecrivains : Ecrire/Filmer… hommage à son œuvre en Vidéo, au Festival de Locarno.

… depuis, espaçant de plus en plus ses "productions", Marcel Hanoun travaille essentiellement en vidéo légère. Il cultive son jardin cinématographique en théorisant, en écrivant.
«Auteur de nombreuses expériences cinématographiques, il a subverti les règles du récit classique» et sa filmographie «constitue la preuve qu’une oeuvre magistrale peut advenir entièrement hors des circuits commerciaux»




Cinéaste maudit par excellence, il est marginalisé à la fois par l’industrie et par la critique. Marcel Martin/Dictionnaire Larousse du Cinéma
une réflexion acharnée, rigoureuse, minutieuse, obsédante, obsédée sur le cinéma lui-même. Sur le cinéma s’interrogeant sur l’aventure qu’il est lui-même, enchaînant images et sons pour la fascinationJean-Louis Bory/Questions au cinéma/ Ed. Stock
Soutenu par Jonas Mekas, qui le considère comme le cinéaste français  le plus important depuis Robert Bresson, le milieu expérimental en fait, dans les années 1970, un de ses mentors. …   …Hanoun bâtit une esthétique faite de ruptures, de collages, et qui nécessite de la part du spectateur un profond investissement personnel.  Raphaël Bassan/ Encyclo –pédia Universalis 2005
La passion, le regard, l’authenticité d’Hanoun font que son œuvre défie réellement le temps. Christiane Kolla/cinéaste
Presque chacun de ses films est un métafilm. Comme Flaubert, invisible au dessus de sa création  et en même temps dévoilant tout dans sa correspondance. Toujours l’oxymore. Dominique Noguez

Marcel Hanoun I from Revista Lumière on Vimeo.















Une simple histoire France/1959/68’/35mm
Avec Micheline Bezançon, Gilette Barbier.
Une femme vient à Paris avec sa fille pour chercher du travail, mais elle n’y rencontre
que la misère.





 L’Authentique Procès de Carl-Emmanuel Jung France/1966/66’/35mm
Avec Maurice Poullenot, Jane Le Gal.
Vingt ans plus tard, reconstitution du jugement d’un homme ordinaire qui se révèle
être un criminel de guerre, Carl-Emmanuel Jung.





La Nuit claire France/1979/90’/35mm
Avec Lorraine Bonnemaison, Gérard Rouzier.
En filmant la répétition d’un opéra, Marcel Hanoun fait clignoter le mythe d’Orphée avec
l’aventure contemporaine de Julien, lui aussi séparé de sa bien-aimée.



Site internet de Marcel Hanoun : www.marcel-hanoun.com


Qui êtes-vous Marcel Hanoun ? Conférence de Stéphanie Serre : www.canal-u.tv/video

STALKER



Stalker (Сталкер) est un film soviétique réalisé par Andreï Tarkovski, sorti en 1979. 




L’histoire de Stalker est une zone interdite dans laquelle serait tombée une météorite. La traverser présente un danger mortel et le « Stalker » chargé de montrer la zone y fait pénétrer en fraude un physicien et un écrivain. Le « Stalker » est une sorte de passeur, d’initiateur qui conduit ces hommes au cœur de la zone dans une chambre où tous les vœux seraient exaucés. A la fin de cette quête, le « Stalker » a perdu sa foi dans l’homme et dans la possibilité de lui donner le bonheur.
Stalker est l'oeuvre cinématographique qui ressemble sûrement le plus à un long poème existentiel aux confins de l'imagination.


Ce film est une œuvre pessimiste, austère, et pourtant il existe une sorte d’idéalisme et de reconstruction possible du monde, un éloge de « l’homme faible » qui recherche un mode de vie philosophique et parfait. Tarkovski dira : « je suis attiré par l’homme qui réalise que le sens de la vie réside avant tout dans la lutte contre le mal qu’il porte en lui-même, et qui lui permettra au cours de sa vie de franchir au moins quelques degrés vers la perfection spirituelle. » Le film Stalker relève plus de la sensation que de la signification, le réalisateur mène une lutte contre cet homme qui prétend maîtriser le monde rationnellement. Stalker caractérise une irrationalité rédemptrice qui détruit l’empire de la raison mais qui sauve l’âme.  Le film du cinéaste russe est une philosophie anthropologique et métaphysique : « Si philosopher est découvrir le sens premier de l’être, on ne philosophe donc pas en quittant la situation humaine : il faut au contraire, s’y enfoncer. Le savoir absolu du philosophe est la perception. »



Il y a chez Tarkovski un certain idéalisme qui reproduit de manière mimétique le réel pour mieux le déjouer. Ce réel suggère la démolition du monde. Ensuite, Stalker reconstruit l’univers qui sera cette fois-ci chargé d’un sens loin de tout cartésianisme : il s’agit de l’irréel. Enfin, cette absence du sens est peut-être une déréalisation du monde qui permettrait à l’homme de toucher au spirituel.

Extrait de Stalker de Tarkovski : reconstruction philosophique du monde selon Gilles Visy 




Pour voir le film: Stalker en streaming
                           Stalker en streaming (second lien)
Photobucket


Ils dansent, ils tournent sur eux-mêmes toujours plus vite jusqu'à être pris de vertige et tomber.


Edgar Allen Poe - La Chute de la Maison Usher -

 La Chute de la Maison Usher

 
La chute de la maison Usher - Epstein / Coil par ESTETTE


I

Dans la plus verte de nos vallées,
Par les bons anges habitée,
Autrefois un beau et majestueux palais,
— Un rayonnant palais, — dressait son front.
C’était dans le domaine du monarque Pensée,
C’était là qu’il s’élevait :
Jamais séraphin ne déploya son aile
Sur un édifice à moitié aussi beau.

II

Des bannières blondes. superbes, dorées,
A son dôme flottaient et ondulaient ;
(C’était, — tout cela, c’était dans le vieux,
Dans le très vieux temps,)
Et, à chaque douce brise qui se jouait
Dans ces suaves journées,
Le long des remparts chevelus et pâles,
S’échappait un parfum ailé.

III

Les voyageurs, dans cette heureuse vallée,
A travers deux fenêtres lumineuses, voyaient
Des esprits qui se mouvaient harmonieusement
Au commandement d’un luth bien accordé.
Tout autour d’un trône, où, siégeant
— Un vrai Porphyrogénète, celui-là ! —
Dans un apparat digne de sa gloire,
Apparaissait le maître du royaume.

IV

Et tout étincelante de nacre et de rubis
Était la porte du beau palais,
Par laquelle coulait à flots, à flots, à flots,
Et pétillait incessamment
Une troupe d’Echos dont l’agréable fonction
Était simplement de chanter,
Avec des accents d’une exquise beauté,
L’esprit et la sagesse de leur roi.

V

Mais des êtres de malheur, en robes de deuil,
Ont assailli la haute autorité du monarque.
— Ah ! pleurons ! Car jamais l’aube d’un lendemain
Ne brillera sur lui, le désolé ! —
Et tout autour de sa demeure, la gloire
Qui s’empourprait et florissait
N’est plus qu’une histoire, souvenir ténébreux
Des vieux âges défunts.

VI

Et maintenant les voyageurs, dans cette vallée,
A travers les fenêtres rougeâtres, voient
De vastes formes qui se meuvent fantastiquement Aux sons d’une musique discordante ;
Pendant que, comme une rivière rapide et lugubre,
A travers la porte pâle,
Une hideuse multitude se rue éternellement ;
Qui va éclatant de rire, — ne pouvant plus sourire.

Premier film apocalyptique "Paris qui dort" de René Clair






Paris qui dort, premier court-métrage, muet, réalisé par René Clair , en 1923, sorti en 1925. Le film aurait dû s'appeler Rayon diabolique.

  
 


Paris qui dort est un grand rêve éveillé de René Clair qu'il a habilement traduit dans sa première vraie réalisation. René Clair tisse la fable improbable d'un scientifique fou qui utilise un rayon magique sur les habitants de Paris qui ne se doutent de rien. Le rayon gèle ses victimes dans des positions bizarres et souvent embarrassantes. Ceux qui ne sont pas touchés en profitent pour voler tout ce qui n'est pas cloué au sol et faire la fête. Mais l'ennui les rattrape. 




Paris qui dort se veut une métaphore de cette grande métropole de l'après guerre de 1914. Un Paris qui se vide, un Paris qui fait peur, un Paris à la limite du cocasse. Cette thématique est appréhendée avec un sens fort du rythme et d'une vision tantôt fantastique, tantôt loufoque.




Quelques années plus tard il réalisera un autre film A nous la liberté en 1931, publié sous forme de roman par Lucien Allina chez Tallandier dans la collection « Ciné Bibliothèque » Il s’agit d’une satyre du monde moderne.Le réalisateur y dénonce l’industrialisation à outrance et le fait que la machine, loin de servir l’homme ne fait que l’entraîner vers sa propre destruction. En 1937, les producteurs du film accusèrent Charlie Chaplin d’avoir plagié dans Les temps modernes certaines scènes du film de René Clair. Le réalisateur très flair-play avoua qu’il en était très honoré et que de toute manière il devait beaucoup à Chaplin.

A nous la liberté, de René Clair en 1931 
 

Paris qui dort, de René Clair en 1925

Furioso


Photobucket

Paul Sharits - Bad Burns





Je dépasserai mes passions au delà du néant 
Opprobre
Je bousculerai les mécanismes divinatoires
Neurula
 
Épancher ....

Furioso by Sophie.b

POUR L’OREILLE DE CREELEY

Photobucket

total de
toutes choses
c’est trop

dans le métro
mon cœur
martelant
précis

mal à la tête
de fumer
moment
de vertige

descendant
en ville pour voir
Karmapa
Bouddha ce soir.

13 décembre 1976
Allen Ginsberg

Quand la Corée du nord fait son cinéma

Avec sa série « Vice Guide to Film », Shane Smith s'est fait une spécialité de décortiquer les industries cinématographiques de différents pays. Mais quand il envisage de pointer sa sympathique bouille à Pyongyang, les choses se corsent.










Si les Etats-Unis ont Hollywood, la Corée du Nord a PyongYong et ses studios de cinéma situés dans la capitale. De véritables quartiers chinois, japonais...y sont reconsitués permettant de produire toute type de film sans quitter le territoire.
Kim Jong Il, grand cinéphile (la légende veut qu'il possède une énorme collection de DVD de films occidentaux) n'hésite pas à donner des conseils aux réalisateurs, aux acteurs et parfois même donne son avis sur les scénarios (comme sur le film "Le Journal d'une jeune nord coréenne").


Toutefois à la fin des années 70 le futur dirigeant nord-coréen souhaite donner une image plus moderne à son cinéma. C'est ainsi qu'il n'hésitera pas à capturer en 1978 à Hong Kong l'actrice Choi Eyun-Hee puis quelques mois après son mari le réalisateur sud coréen Shin Sang-Ok . Leur histoire est digne d'un James Bond et aurait pu faire un excellent scénario de film sauf que là l'histoire est véridique et que le couple restera prisonnier pendant quelques années en Corée du Nord.
Il s'agissait pour le régime d'avoir un réalisateur reconnu qui serve la propagande en place. Shin Sang-Ok se distinguera notamment par la réalisation du film "Pulgasari" en 1985. Il s'agit d'un film que les puristes appellent un Kaiju-Eiga (film de monstre en Japonais). Le plus connu étant sans doute la série des "Godzilla" produit par la Toho au Japon.  "Pulgasari" innove de par son sujet mais également par la collaboration avec les Japonais. Ainsi le studio Toho s'occupe des effets spéciaux tandis que l'acteur Kenpachiro Satsuma qui avait enfilé auparavant le costume de Godzilla interprête ici "Pulgasari".




Pour la partie japonaise aucun rapt n'eut lieu. Le film reste un OVNI Cinématographique pour la Corée du Nord. Shin Sang-Ok et Choi Eyun-Eee réussiront par la suite à s'enfuir en faussant compagnie à leurs "gardes du corps" nord-coréens durant un voyage pour le festival de Venise en 1986.
En dehors de "Pulgasari", la Corée du Nord s'essaya à un autre genre très en vogue en Asie à savoir le cinéma d'action comme on en trouve à Hong-Kong. C'est ainsi que fut produit "Hong Kil Dong" en 1986. Des tentatives de moderniser le cinéma nord-coréen et de lui donner un aspect exportable ce qui sera d'ailleurs le cas puisque "Pulgasari" sortira notamment au Japon.
Cette ouverture vers l'étranger peut se remarquer aussi avec des co-productions comme l'étrange "Ten Zan l'ultime mission". Ce film sans saveur qui a pour origine l'Italie montre un PyongYang moderne à travers un film d'espionnage rocambolesque. La plupart du temps néanmoins les films étrangers tournés en Corée du Nord sont des documentaires qui doivent recevoir l'aval des autorités en place.




La vitrine du cinéma en Corée du Nord serait sans doute le festival du film de PyongYang créé en 1987 sous l'impulsion de Kim Jong Il. Tous les deux ans sont projetés des films à la fois nord-coréens mais aussi étrangers avec des invités du monde entier. C'est ainsi que furent montrés dans la capitale à l'occasion de cet événement des films comme "La Marche de l'Empereur" ou bien encore "Shaolin Soccer".  C'est d'ailleurs grâce à ce festival que James Velaise, le responsable de Pretty Pictures, a pu prendre les contacts nécessaires afin de sortir le premier film nord-coréen en France : "Le journal d'une jeune nord-coréenne". Le festival est avant tout reservé aux professionnels et le grand public nord-coréen n'a jamais eu l'occasion de voir un film occidental jusqu'au 26 décembre 2010 où "Joue la comme Beckham" fut diffusé à la télévision ce qui a constitué une première et sans doute une petite révolution dans un pays aussi fermé.
S'il y a néanmoins un domaine où la Corée du Nord arrive à s'ouvrir et même exporte ses productions c'est au niveau de l'animation avec notamment les fameux studios SEK (Science Educational Korea). De nombreux films d'animation ont été réalisés dans ces studios principalement en raison du faible coût de la main d'oeuvre mais aussi du fait de la qualité des différents animateurs y travaillant. Un des premiers projets français réalisé avec ce studio fut le superbe "Gandahar" de René Laloux sorti en 1988.  D'autres projets furent également réalisés là-bas comme la série animée "Corto Maltese". L'auteur québécois Guy Delisle a ainsi pu faire partager son expérience dans ce studio à travers la bande dessinée "PyongYang". Le studio permi aussi le temps d'un film de réunir les deux corées en 2005 avec "L'impératrice Chung" qui sorti à la même date dans l'ensemble de la péninsule coréenne.




Au delà de ces co-productions, l'animation reste aussi un élément clef pour le cinéma et la télévision nord-coréenne où elle reprend un visage plus politique à l'image des films en prise de vue réelle.
A la fois sous-traitant mais aussi véritable acteur dans le monde de l'animation, la SEK cumule les casquettes mais est sans doute le visage le plus intéressant dans le domaine du film nord-coréen.
Finalement la Corée du Nord dévoilera sans doute l'ensemble de ses différentes réalisations cinématographiques le jour où le pays s'ouvrira véritablement. Pour le moment ce ne sont que quelques bribes qui parviennent jusqu'à chez nous mais qui nous permettent de voir  que le cinéma reste un élément culturel incontournable du pays à la fois en tant que divertissement mais aussi en tant que medium pour véhiculer l'idéologie en place.

Propos recueillis sur kochipan.org

Collectif jeune cinéma


INK de Sarah DARMON
Super8
FR 2001

Le collectif fête ses 40 ans ...
Joyeux anniversaire !!

Le Collectif Jeune Cinéma ses origines

La première séance du Collectif Jeune Cinéma a eu lieu à Paris le 23 juin 1970 au Studio du Val-de-Grâce. Elle comprenait des films qui venaient d'être présentés au Festival International du Jeune Cinéma de Hyères et était organisée par Marcel Mazé. Celui-ci avait rencontré, à la suite de ce festival, Jonas Mekas, cofondateur de la Film-Makers’Cooperative de New-York. Peu de temps après, ceux qui allaient faire partie du premier Conseil d’Administration de la coopérative, se sont joints à Marcel Mazé. Ils participèrent, avec ce dernier, à la sélection des films pour le Festival d'Hyères 1971. Une vingtaine de projections, attirant un public de plus en plus nombreux, eurent lieu, entre autres, à L'Institut d'Art et d'Archéologie de la rue Michelet, au Studio du Val-de-Grâce et à la Faculté de Droit d'Assas ; avant la création juridique de la première coopérative française de ce type, le 5 juin 1971 à Paris.

Ce jour-là, l’assemblée générale constitutive a élu le premier conseil d’ administration fondateur qui était composé de Raphaël Bassan, Noël Burch (secrétaire général), Jean-Paul Cassagnac, Yves-Andé Delubac, Daniel Geldreich, Marcel Mazé (président), Maud Meimon, Luc Moullet (vice-président) et Claude Thiébaut.

Le regroupement en une coopérative, inspiré du modèle de la Film-Makers’Cooperative de New York, avait été décidé par les cinéastes présents au Festival d'Hyères 1971 qui avaient pris acte du fait qu'aucune structure de diffusion commerciale ou associative (les ciné-clubs) n'était en mesure de diffuser leurs films. Cette coopérative donna une identité propre au cinéma expérimental français et aux cinéastes qui n'étaient plus isolés. Tout le renouveau du cinéma d'avant-garde français est né de là, de ce qu'on a appelé, ensuite, le mouvement coopératiste.

Le Collectif Jeune Cinéma était en avance sur son temps car il présentait, sans discrimination, toutes les formes de cinéma marginalisées par la culture officielle : du cinéma différent, expérimental, d’avant-garde, autre, indépendant, personnel, underground, même, d'intervention, parallèle, nouveau, singulier, militant, de création, d’ art…

Le Collectif Jeune Cinéma a organisé, aussi bien à Paris où il programma de nombreuses salles (L'Olympic, La Vieille Grille, le Palais des Arts, Le Passage Dallery, entre autres) qu'au Festival d'Hyères (jusqu'à son arrêt en 1984) et en province, des centaines de projections assurant promotions et débats, analyses et polémiques sur toutes les formes de cinéma différent qui marquèrent les années 1970 et le début des années 1980. Le Collectif était aussi présent, outre dans les salles de cinéma classiques, également dans les musées, les bibliothèques, les centres culturels, les lycées, les facultés. Yves Bessy, Gérard Courant, Patrice Kirchhofer, Jean-Paul Dupuis, Claude Brunel et plusieurs autres cinéastes ont assuré, avec Marcel Mazé, la gestion et l'animation de la coopérative. En 1973, le Collectif Jeune Cinéma a organisé, grâce à Marcel Mazé, au Centre américain du boulevard Raspail, à Paris, une projection historique de l'unique film réalisé par Jean Genet : « Un Chant d'amour », interdit par la censure.

Après cette date, le Collectif diffusa largement ce classique du cinéma qui suscita de nombreuses études. Peu de temps après, en 1974, l’interdiction fut levée, ce qui a valu au Collectif de diffuser largement le film avec l’autorisation de son auteur. Cette action a aussi permis d’obtenir un statut pour les films autoproduits.

Le Collectif a publié, entre 1976 et 1980, vingt-six numéros de la revue « Cinéma Différent », fondée par Marcel Mazé et Patrice Kirchhofer (qui en fut le premier directeur de la publication), dans lesquels des études sur la pratique et les théories du cinéma expérimental, françaises et étrangères, ont été développées par des cinéastes, des critiques ou des écrivains comme Marcel Hanoun, Marguerite Duras, Dominique Noguez, Théo Hernandez, Michel Nedjar, Laura Oswald, Bernard Perraudin, Maurice Perisset, Claude Brunel, Jean-Pierre Céton, Patrice Kirchhofer, Raphaël Bassan, Hervé Delilia, Katherina Thomadaki, Maria Klonaris, Jérôme de Missolz, Raymonde Carasco et bien d'autres.

Le nouveau Collectif Jeune Cinéma

Le nouveau Collectif Jeune Cinéma est né de la volonté de quelques cinéastes et cinéphiles, qui, en 1998, ont voulu refonder une coopérative, sur le modèle de l’ancien Collectif Jeune Cinéma et dont ils ont voulu conserver le nom.

En 1989, pressé par le Centre National de la Cinématographie, et devant la baisse de l’activité locative des coopératives — due en partie à l’arrêt du Festival international du Jeune Cinéma de Hyères en 1984 — le Collectif Jeune Cinéma s’est associé à Light Cone pour assurer la diffusion de leurs films dans un catalogue commun. Le CJC apportait les locaux de la rue Louis Braille et Light Cone le secrétariat. Le premier catalogue commun a été édité en octobre 1989.

En 1998, un certain nombre de cinéastes du Collectif manifestèrent leur intention de quitter amicalement cette structure commune pour des raisons économiques et administratives.

L’assemblée constituante du Nouveau Collectif Jeune Cinéma a eu lieu le 5 juin 1998 au sous-sol du café « La Taverne », 25 rue de Caumartin à Paris, dans le 9 ème arrondissement. Les membres fondateurs présents ou représentés ont rétabli le bureau de l’ancien Collectif et demandèrent à Marcel Mazé, nouvellement libéré de ses obligations à l’AFP, d’établir un catalogue informatisé qui permettrait de diffuser les films via Internet. Ce qui fut fait et les locations reprirent progressivement.

Dans le même temps, une autre association, DCA (D’un Cinéma l’Autre) comprenant quelques membres du CJC, préparait depuis 1995 un festival dédié au cinéma différent et expérimental.

Le premier eut lieu en janvier 1999 au cinéma La Clef, dans le 5 ème arrondissement de Paris.

Après ce 1 er Festival des Cinémas Différents de Paris, sous titré « De Hyères à Aujourd’hui », et qui fut couronné de succès, l’équipe de DCA éclata et se dispersa. Le CJC assura seul la relève, de jeunes cinéastes et vidéastes souhaitèrent déposer leurs œuvres et travailler au nouveau Collectif. Le fonds historique s’enrichit ainsi de créations contemporaines, jusqu’à devenir majoritaires dans le catalogue.

Depuis mars 2006, le CJC est en résidence à Mains d'Œuvres où ses bureaux sont installés et ouverts tous les jours de 10h30 à 18h30. Les programmateurs, chercheurs, enseignants, journalistes, critiques ont la possibilité de consulter sur place les films 16mm, Super 8 et vidéos, ainsi que des éléments de documentation (uniquement sur rendez-vous).

Entre 2007 et 2010, le CJC édita, sous la responsabilité éditoriale de Rodolphe Olcèse et Violeta Salvatierra, onze numéros de la revue étoilements

Les locations, les interventions, les participations, les programmations, dans des festivals, des établissements culturels, d’enseignement, ou tous autres lieux, se multiplient, et le CJC continue d'organiser chaque année au mois de décembre le festival des Cinémas Différents de Paris.

Raphaël Bassan, Marcel Mazé (2002), mis à jour par l'équipe du CJC.

Situation du cinéma expérimental en France

Situation du cinéma expérimental en France from DERIVES on Vimeo.